à l'envi

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La Ronde de Juillet 2018: Désert

Pour la ronde, un sujet commun est choisi, sur lequel chacun s'exprime et publie chez un(e) autre qui publie chez le suivant jusqu'à boucler la ronde. Elle tourne tous les deux mois et chaque fois nous étourdit.

 

Le thème de notre ronde, ce mois-ci, est  désert(s)...

 

 

Ainsi va la ronde aujourd'hui,

 

 

qui écrit chez Dominique Autrou
qui écrit chez Dominique Hasselmann
qui écrit chez Franck (ici!)
qui écrit chez Jean-Pierre Boureux
qui écrit chez Giovanni Merloni
qui écrit chez Marie-Noëlle Bertrand
 

 J'ai le grand plaisir d'accueillir Dominique Hasselmann et je remercie Céline de m'accueillir sur son blog.

 

 

 


 

 

 

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Désert occasionnel

 

Il peut s’étendre sous toute forme, sablonneuse, liquide, aérienne, mentale : il n’a pas de limites hors celles qui peuvent lui être données par la géographie, le satellite ou la mémoire. Le désert est toujours présent car son absence ne se fait pas remarquer et sa présence peut échapper au regard, proche ou distant. Je me souviens de l’oasis de Ghardaïa, en Algérie, la luxuriance de ses palmiers, le coulis permanent de son eau fraîche, ce havre vert à côté d’un monde minéral incertain (peut-être des serpents y survivent-ils ?), comme la frange d’un autre univers, la dernière étape avant d’entrer dans l’Achéron aux millions de grains, de poudre d’escampette, de dépôts marins ou célestes, du travail acharné d’un vent millénaire ou si ancien qu’il serait impossible à compter en siècles. Dans son sillage, le désert (ici, le Sahara) produit des dessins de vagues, les bateaux invisibles le parcourent sans cesse, les dunes ressemblent à des déferlantes apparemment immobiles et sereines – l’océan est un frère solide – mais elles se déplacent sans doute de nuit, quand le lampadaire de la lune éclaire leur progression silencieuse. Ce tableau changeant modèle un paysage pictural d’or et d’ocre, on cherche en vain qui tient le pinceau. Le vent s’amuse à faire bouger les contours de la dernière esquisse, comme la péniche rompt le calme du canal avant qu’il ne reprenne ses habitudes assoupies. Dans le désert du ciel, un avion passe, il laisse une trace, une signature, qui viendra plus tard s’effacer, son intrusion ayant détruit durant quelques minutes la marche ordonnée des nuages. Les yeux suivent ces lignes blanches qui ont imprimé leur élan sur la rétine : celle-ci les conservera un temps – celui de leur apparition – et puis elle passera à autre chose. Le désert mental recèle d’infinies ressources, l’amnésie progresse sans faire de bruit, « ne pas déranger » la chambre d’hôtel de la mémoire. Au dehors, des êtres se croisent sans se voir ou se parler car chacun possède son désert intérieur dont l’exploration arrivera à son terme un beau jour. Une plage de musique (Xenakis, par exemple) nous entraîne alors vers l’infini de la représentation.

 

texte et photo : Dominique Hasselmann



15/07/2018
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