Lettre(s): la ronde de Novembre 2017
Lalala mine de rien, la voilà qui revient...
La ronde, un sujet commun, sur lequel chacun s'exprime et publie chez un(e) autre qui publie chez le suivant jusqu'à boucler la ronde.
Le thème de notre notre ronde, ce mois-ci, est lettre(s)...
Ainsi va la ronde aujourd'hui,
Marie Christine :
https://mariechristinegrimard.
écrit chez...
Marie Noelle :
http://ladilettante1965.Dominique A :
https://dom-a.blogspot.fr/Franck (c'est ici!) : https://www.blog4ever.com/gestion/articles/composer/12320108
Giovanni (merci Giovanni de m'accueillir) :
https://leportraitinconscient.Dominique H :
https://hadominique75.
J'ai donc l'honneur, le privilège, le grand plaisir d'accueillir Jacques et ses lettres...
28 août
La journée a été dure comme c’était prévisible : une fois de plus tu as tenu le meilleur rôle ! Tout le monde a fait cercle autour de toi, les gens étaient très gentils, aimables et attentionnés : comme ils ne pouvaient plus te parler, pour une fois ils sont venus me voir : « cette pauvre Sonia, quelle belle vie malgré tout/elle a été très courageuse/personne n’a rien su pendant des mois/quelle cérémonie magnifique /etc. »
J’ai été très poli et patient avec eux je t’assure, tu aurais été fière, très gentil moi aussi, on m’a dit dans l’après-midi qu’on allait me remettre l’urne dans quelques jours. Tout ça a finalement duré des heures et des heures, et le soir j’étais seul enfin sur la digue à Herville, les nuages gris étaient comme ourlés d’un givre doré, puis le ciel de cette fin d’été s’est lentement éteint, je pouvais enfin te retrouver, me retrouver. Tranquille et fatigué comme nous l’étions très souvent toi et moi en semaine. Presque rien de nouveau en somme.
29 août
Réveil difficile, l’impression d’avoir la bouche pleine de farine, ou plutôt d’une sorte de pâte crue qui m’encombrait. Quand ça allait encore bien, tu disais qu’il te restait plein de choses à faire, je reprends ta phrase à mon compte.
Comme on ne peut plus se parler je t’écris. Pas ouvert l’ordinateur ou la radio, juste écouté du jazz : Cécile McLorin Salvant , histoire de nous souvenir du concert de Lorient, je crois que c’était en mai 14.
La voix humaine donc : un piano, la batterie, mais la voix tient la meilleure part dans le disque , c’est toujours le plus bel instrument du monde. Pendant que la musique me lavait l’âme, je feuilletais le livre de Sarah Moon.
Avec un peu d’alcool, ce goût de farine disparaît finalement.
8 septembre
Silence, les premières feuilles au sol, et de la même manière beaucoup de papiers et de lettres sont arrivés et j’ouvrirai tout ça plus tard. Vers dix heures j’ai ouvert l’urne au dessus du ruisseau et tu t’es envolée vers le large, dissoute. Besoin accru de solitude. Ce soir je me suis baigné, j’ai dormi ensuite à l’abri des dunes et me suis réveillé à la nuit tombée; le ciel était traversé d’étoiles filantes et pour la première fois il m’a paru rose, ce qui est matériellement impossible. J’ai marché dans cette lumière improbable jusqu’au Bouffay, la conscience tranquille.
13 septembre
J’ai repris le travail, cahin-caha . Je suis allé au Palais comme chaque lundi pour une audience banale. Juger c’est passer au crible le caniveau et l’ordure, tout voir, tout entendre surtout, du grand spectacle pour de très petites décisions, toutes prévues par le Code. Les gens m’ont épargné un moment, très prévenants ce premier jour, mais bien sûr tout continuera. La vie habituelle et rassurante. À la maison, toujours pas ouvert l’ordinateur ; impossible pour moi de lire ce qu’on dit de toi, les hommages, tes amis, des messages, les insupportables réseaux sociaux, L’engouement et l’oubli également inépuisables des journalistes.
Eux qui parlent à tort et à travers, et moi je ne parlais pas assez à ton goût, c’est juste, mais souviens-toi nous savions à quoi nous en tenir sur la parole humaine.
Encore de la musique.
22 septembre
Hier équinoxe, marée de coefficient 103 le vent s’est calmé vers 17 heures puis une heure de grâce dans le bourdonnement des abeilles près du fil de linge.
30 septembre
J’ai fini par ouvrir l’ordinateur, j’ai vu tous les messages et j’ai refermé. En écoutant un concert de jazz en direct je me suis endormi sur le canapé de la chambre des enfants, j’ai fait un drôle de rêve : une épidémie ravageait le monde, transportée par les avions et moi j’étais à la porte de l’aéroport chargé de trier les passagers dans l’urgence , puis de les conduire dans un autobus à pleine vitesse vers un tunnel donc je savais bien qu’il était beaucoup trop étroit pour le véhicule, un peu comme un pavillon de clarinette . J’ai fini la nuit dans notre chambre, au pied du lit des piles de livres que nous partagions et des dossiers d’instruction (…)
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